Mondoculture, le blog des découvertes

Mondoculture, le blog des découvertes

Sindelar, le virtuose face aux dictateurs

Évoquer Matthias Sindelar c’est évoquer un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître, ni les moins de 80 ans d’ailleurs. Comme un clin d’œil à Aznavour le footballeur autrichien est né en Bohême, ou plutôt en Bohème-Moravie, le 10 février 1903, à une époque où cette province tchèque appartenait à l’empire d’Autriche-Hongrie. Mais ce n’est pas à Aznavour que Sindelar restera lié pour la postérité. Non le génial attaquant sera rapidement surnommé le « Mozart  du football ». Il faut dire qu’il partageait la même virtuosité et la même nationalité que le célèbre compositeur. Pis, Sindelar a poussé le mimétisme jusqu’à mourir à l’aube de ses 36 ans, comme l’auteur des « noces de Figaro ». Comme son compatriote Sindelar a porté très haut les couleurs de l’Autriche, au sein de la mythique Wunderteam, l’équipe nationale autrichienne qui terrorisait la planète football des années 1930. Mais son œuvre fut entravée et abrégée par la montée des régimes totalitaires. Rencontre avec un génie de l’Histoire du football, acteur malgré lui de l’Histoire avec un grand H.

 

Le jeune Matthias Sindelar débarque à seulement 2 ans à Vienne, la capitale de l’empire austro-hongrois. Mais loin des fastes de la cour impériale des Habsbourg, ses parents juifs s’installent dans le quartier populaire de Favoriten. C’est là, dans la rue, que le petit Matthias commence l’apprentissage du football, en parallèle de ses études de serrurier. Mais les verrous il ne va bientôt les faire sauter que sur les terrains, en 1918, Sindelar est repéré par un recruteur et est engagé par le Hertha Vienne. À 19 ans il intègre l’équipe 1ère et marque ses 1ers buts en championnat viennois. Ses 1ers mais loin d’être ses derniers, car Sindelar va rapidement devenir l’un des meilleurs buteurs autrichiens de l’Histoire, même si avant d’être un buteur de talent le joueur est avant tout un virtuose balle au pied, capable d’éliminer ses adversaires avec une facilité déconcertante, d’où son 2e surnom : « Der papierene » ("l’homme de papier"). Surnom donné tout autant pour sa facilité à s’infiltrer entre les défenseurs que pour son apparence chétive (63kg pour 1m79). Sindelar devient rapidement trop fort pour le modeste club du Hertha Vienne, en 1924 le club descend et est contraint de vendre sa pépite aux Amateurs de Vienne, qui viennent tout juste de remporter le championnat, et changent de nom en 1926 pour devenir l'Austria de Vienne.

« Der papierene » va contribuer, pendant plus de 14 ans, à garnir l’armoire à trophée du club. Avec Sindelar les mauves remportent un championnat en 1926, 5 coupes d’Autriche (1925, 1926, 1933, 1935 et 1936) et même 2 coupes Mitropa (en 1933 et 1936), l’ancêtre des coupes d’Europe actuelles, qui regroupait les meilleurs clubs d’Europe centrale de l’époque. Sindelar termine meilleur buteur de la compétition lors de la campagne victorieuse de 1933, notamment grâce au triplé qu’il inscrit lors de la finale retour face à l'Ambrosiana Inter Milan, triplé qui donne le titre (3-2) après le match nul (1-1) obtenu en Italie. Le « Mozart du football » reste encore aujourd’hui le 2e meilleur buteur de l'Austria Vienne avec un total officiel de 160 buts en championnat et un bilan, officieux, de près de 600 buts en 700 matchs disputés avec le club de la capitale. Cette réussite aura attiré les convoitises des plus grands clubs de l’époque, à commencer par les clubs britanniques, et notamment Manchester United, mais Sindelar restera fidèle à son Autriche.

 

Mais au-delà de ses résultats brillants en club, c’est son parcours en équipe nationale qui va permettre à Sindelar d’entrer dans la légende. L’histoire d’amour entre « Der papierene » et la sélection débute en 1926. Comme un symbole le sélectionneur Hugo Meisl le convoque pour un match en Tchécoslovaquie, sa région natale. C’est donc le 28 septembre 1926, à Prague, que Sindelar honore sa 1ère sélection et ouvre la marque au bout de 25 minutes seulement (victoire finale 2-1), un mois plus tard l’Autriche écrase la Suisse 7 à 1, le jeune joueur de 23 ans y va de son doublé et inscrit encore un but face à la Suède (victoire 3-1) : 3 sélections, 3 victoires et 4 buts inscrits, c’est ce qu’on appelle des débuts fracassants !

La suite va être un peu plus compliquée, ainsi fin 1928 le virtuose est écarté de l’équipe par Meisl, motif : le joueur porte trop la balle et manquerait d’implication durant les rassemblements. Sindelar continue alors à jouer ses partitions pour le seul Austria de Vienne, mais finalement ses performances en club et la pression populaire poussent le sélectionneur à le rappeler en mai 1931, après plus de 2 ans d’absence. Cette convocation ressemble à un cadeau empoisonné, car c’est l’Écosse qui se présente à Vienne, une Écosse qui n’a encore jamais perdu contre une équipe continentale. Mais l’Autriche va émerveiller les 60 000 spectateurs présents en écrasant les Britanniques 5 à 0 ! Auteur d’un but Sindelar a joué un véritable récital, Mozart est de retour aux affaires !

Dans la foulée de ce triomphe, qui lui permet de remporter l'UFWC, l’Autriche va enchaîner une série impressionnante, durant laquelle elle obtient le surnom de « Wunderteam » (« La merveilleuse équipe ») après avoir écrasé l’Allemagne à Berlin (6-0). En 12 matchs disputés entre mai 1931 et décembre 1932, l’Autriche en remporte 10 et ne concéde que 2 nuls, inscrivant la bagatelle de 49 buts ! Sindelar participe à 11 de ces rencontres et inscrit 12 buts, son chef d’œuvre, sa symphonie à lui, ayant lieu le 24 avril 1932, à Vienne. Face à une Hongrie qu’elle n’avait pas battu depuis 8 matchs, l’Autriche joue son meilleur football sous l’impulsion de son Mozart, face à un auditoire ébahit, le virtuose inscrit 3 buts en une demi-heure puis distille 5 passes décisives, score final 8-2 !

 

La terrible Wunderteam, avec Sindelar en haut au milieu

 

Fort de cette série la Wunderteam s'en va défier, le 07 décembre 1932, la redoutable équipe d'Angleterre, la référence absolue à l'époque. À Londres Sindelar brille de 1000 feux, l'arbitre de la rencontre, le belge John Langenus, témoigne: "Zischek a marqué deux buts mais la frappe de Matthias Sindelar était vraiment exceptionnelle. Personne n'avait jamais réussi pareil exploit face à une équipe du calibre de l'Angleterre. C'était la première et dernière fois. Sindelar a récupéré le ballon dans sa moitié de terrain et il s'est lancé à l'attaque, effaçant tous les adversaires qui se présentaient devant lui avec cette facilité et cette élégance qui n'appartenaient qu'à lui. Après un dernier crochet, il a tenté sa chance...". Ce but, sans doute le plus beau de sa carrière, n'est pas sans rappeler celui inscrit, face à ces mêmes anglais, par un autre génie, un certain Diego Maradona, en demi-finale de la coupe du monde 1986. Autre époque, autre résultat, car si l'Argentin a mené son équipe au triomphe, Sindelar ne peut empêcher la défaite des siens, 4 à 3. Mais l'essentiel n'est pas là, l'Autriche est la 1ère sélection continentale à marquer plus d'un but en Angleterre et, surtout, les avis des spectateurs sont unanimes, la "Wunderteam" a dominé la meilleure équipe de l'époque et ne méritait pas de perdre la rencontre. Cette performance permet aux Autrichiens d'être fêtés en héros à leur retour à Vienne, Sindelar est au sommet de son art.

De bonne augure à quelques mois de la coupe du monde 1934, l’Autriche forte de sa victoire en coupe d’Europe des nations 1932 (l’ancêtre de l’Euro) se présente en favorite en Italie, d’autant que les Anglais et les Uruguayens (champions en 1930) boycottent l’épreuve, tandis que l’Argentine (finaliste en 1930) et le Brésil y présentent des équipes fortement remaniées. Sindelar se déplace donc dans le pays voisin pour y chercher la consécration mondiale, mais cette coupe du monde 1934 va être l’occasion pour lui de connaître ses premiers déboires avec les régimes totalitaires.

 
Sindelar à l'assaut de la coupe du monde 1934

À l’époque l’Italie est dirigée par Benito Mussolini, qui a pris le pouvoir en 1922 et construit un régime fasciste. Le mondial 1934 est une aubaine pour ses conseillers, ceux-ci parviennent à convaincre le Duce (« le guide ») d’accueillir la 2e coupe du monde de football, pour faire une publicité extraordinaire au le régime italien, sous sa pression la FIFA accorde l’organisation à l’Italie.

Lors du 1er match de l’Autriche, contre la France, Sindelar éclaire le jeu de son équipe et la « Wunderteam » sort de ce match piège grâce à une victoire 3 à 2 après prolongations, avec un but et deux passes décisives de « Der papierene ». Le quart de finale face à la Hongrie est difficile: Sindelar ne brille pas autant qu’à l’accoutumée et l’Autriche arrache la victoire (2-1), mais au prix de nombreux blessés suite à cette bataille contre l’ancienne moitié de l’Empire.

Le 3 juin 1934, à Milan, Sindelar et ses coéquipiers se voient proposer un énorme défi : face à eux en demi-finale se dresse l’Italie, le contexte a bien changé depuis la victoire de la « Wunderteam » en amical, 4 buts à 2 quelques mois auparavant.. Mussolini a compris que le football pouvait être une vitrine exceptionnelle pour son régime, un fédérateur du peuple italien, mais à condition que l’équipe nationale réalise une grande coupe du monde.Les Italiens franchissent facilement le 1er tour (7 à 1 contre les États-Unis), mais le quart de finale face à l'Espagne est beaucoup plus polémique. La qualification se jouera sur 2 matchs, le 1er ayant débouché sur un score de parité (1-1) et les tirs au but n'existant pas à l'époque, c'est le match d'appui qui qualifiera les transalpins, 1-0. Mais à quel prix: les 2 arbitres de ces rencontres ont laissés, sans broncher, les Italiens littéralement agresser leurs adversaires (lors du 1er match, l'Italien Monti blessera à lui seul 4 Espagnols), ont refusés 2 buts valable aux ibériques et ont accordé le but du match d'appui aux Italiens malgré un placage en règle du gardien adverse. Pour ce match d'appui le correspondant de L'Auto (ancêtre de L'Équipe) écrit d'ailleurs: "Il (ndlr:l'arbitre) fut fréquemment le 12ème homme de l'Italie.". Les deux arbitres différents de ce quart de finale ont, semble-t-il, influencé lecours des matchs.

En même temps il semble difficile pour les hommes en noir de résister à la pression du contexte de ce mondial. Il fallait en effet avoir un fort caractère pour rester impartial face à la présence électrisante de Mussolini à chaque match de l'Italie. Les arbitres devaient d'ailleurs en quelque sorte prêter allégeance au Duce, ils étaient régulièrement convoqués dans sa loge personnelle et devaient, avant chaque match, effectuer le salut fasciste vers le Guide Italien. Alors collusion des arbitres ou simple pression naturelle? Toujours est-il qu'avant sa demi-finale Hugo Meisl avoue: "Je crains l'Italie, mais je crains encore plus l'arbitrage."...

                                                                                                                                                 

 


Dès l’entame du match Matthias Sindelar est la cible privilégiée du jeu rugueux des transalpins. À la 5e minute la star autrichienne se fait découper dans la surface adverse par le récidiviste Monti, l’arbitre suédois Ivan Eklind ne réagit pas. Il ne bronchera pas plus à la 19e minute lorsque Guaita ouvre la marque pour l’Italie, alors que Meazza a clairement bousculé le portier autrichien. Les Autrichiens se mettent alors à dominer outrageusement le match mais l’arbitre a tendance à siffler en leur défaveur, il va même jusqu’à dégager de la tête (involontairement ?) un long ballon destiné à un ailier autrichien isolé devant les cages italiennes !

Un arbitrage controversé, un public chauffé à blanc, un terrain lourd ne favorisant pas son style de jeu et un Sindelar diminué par l’agression de Monti, tous ces ingrédients entraînent la défaite des Autrichiens, par la plus petite des marges, 1 à 0. Malgré leur domination, la Wunderteam, et Sindelar, n’ont plus que leurs yeux pour pleurer, leur rêve mondial s’envole et ils laissent l’Italie accéder à une finale qu’elle remportera (2 à 1 après prolongations) face à des Tchécoslovaques quelques peu remontés eux aussi par l’arbitrage proposé…

La dévastation dans le camp autrichien suite au but italien

L’Italie a réussi son pari, être sacrée chez elle, mais malgré le talent indéniable de certains de ses joueurs (Schiavo et Meazza en tête), cette victoire prête à polémique, d’ailleurs Jules Rimet, président de la FIFA, ne dira-t-il pas : « Durant cette coupe du Monde le vrai président de la FIFA était Mussolini »

Lors de la petite finale, le 07 juin, l’Autriche s’incline 3à 2 face à l’Allemagne, sans Sindelar, toujours sur le flanc depuis la demi-finale. La Wunderteam finit donc 4e de cette coupe du monde 1934, c’est un échec. À leur retour les joueurs autrichiens sont cette fois accueillis par des sifflets et des critiques dans la presse, on parle même de « Plunderteam » (« équipe en toc »).

 

Ce traitement semble un peu injuste : sur les 3 dernières années la sélection a disputé 30 matchs, en a remportés 20, pour 6 nuls et seulement 4 défaites, le tout pour un total de 101 buts inscrits, seule l’Italie gardant sa cage inviolée face aux déferlantes autrichiennes, mais à quel prix ! Sindelar a survolé cette période dorée du football Autrichien, il a pris part à 24 rencontres pour un total de 19 buts !

Mais le joueur de l'Austria sent bien que Mussolini lui a brisé son rêve de devenir champion du monde. Il se doute aussi qu’à son âge (plus de 31 ans), l’occasion ne se représentera sans doute plus. D’autant que l’équipe d’Autriche est en pleine mutation, certains joueurs prennent leur retraite internationale, d’autres filent à l’Ouest, où ils sont naturalisés, pour fuir les tensions politiques qui s’installent en Autriche. La « Wunderteam » semble déjà appartenir au passé, pire Meisl fait de moins en moins appel à Sindelar, malgré les performances impressionnantes de celui-ci avec l'Austria. Ainsi après le mondial italien, le « Mozart du football » n’honore que 6 sélections (pour 2 buts) en 2 ans et demi, ratant notamment les Jeux Olympiques de Berlin, en 1936, où l’Autriche termine 2e derrière…l’Italie.

En février 1937, Meisl décède, Sindelar va effectuer son retour en sélection : 4 matchs en 6 mois. Le 19 septembre 1937, à Vienne, il participe à la victoire 4 à 3 face à la Suisse, y allant même de son petit but. Il ne le sait pas encore mais ce match sera sa dernière sélection pour l’Autriche, le génie s’arrête donc à 43 sélections pour 26 buts. Pourtant quelques jours plus tard l’Autriche se débarrasse (2 à 1) de la Lettonie et se qualifie pour le mondial français, Sindelar espère alors être de l’aventure. Las, l’Autriche ne se rendra même pas à la coupe du monde 1938!

 

Et pour cause, entre temps la situation a grandement évolué pour le pays. En juillet 1934, un mois après la déconvenue de la Wunderteam en Italie, le chancelier Dolfuss est assassiné par des nazis en pleine ascension dans un pays gangrené par le chômage (près de 40 % en 1935). Cette montée du nazisme et de la violence va permettre à Hitler, le 12 mars 1938 de réaliser l'Anschluss, l’annexion de son voisin autrichien. Dès lors l’Autriche n’existe plus en tant que pays et devient l'Ostmark (« marche de l’Est »), une province du Reich allemand. Cette disparition du pays entraîne, de fait, le forfait de sa sélection pour la coupe du monde 1938, les nazis viennent de voler de nouveau le rêve de Sindelar.

Pour atténuer les tensions suite à cette annexion le parti nazi organise un match amical entre l’Allemagne et l'Ostmark, le 03 avril 1938, à Vienne. Le scénario est écrit à l’avance, le match doit se solder par un 0-0 contentant tout le monde. Mais Sindelar ne l’entend pas de cette oreille, à 35 ans il s’amuse des défenseurs allemands, les éliminant à de multiples reprises avec la facilité qui le caractérise. Mais il fait ensuite exprès de rater grossièrement l’immanquable, pour mieux souligner sa supériorité technique. Finalement « Der papierene » ouvre le score, malgré les consignes d’avant-match. Pire, pour fêter son but, dans un silence de cathédrale, Sindelar va effectuer une danse de célébration devant la tribune des dignitaires nazis ! Finalement l'Ostmark remporte le match 2-0, les rescapés de la « Wunderteam » ont mis un point d’honneur à prouver une dernière fois leur talent avant leur disparition (L’Autriche ne jouera plus de matchs pendant plus de 7ans).

Cet affront a irrité au plus haut point les dignitaires nazis, leur opinion de Sindelar va encore baisser lorsque ce dernier refuse de renforcer l’équipe d’Allemagne à la coupe du monde, pour cela il prétexte son âge avancé et une blessure au genou vieille de…15 ans ! Le rêve de Sindelar était de remporter le titre avec l’Autriche, certainement pas avec l’Allemagne nazie. Le joueur autrichien s’oppose également aux consignes nazies lorsqu’il déclare à Schwarz, l’ancien président juif de l'Austria, renvoyé après l'Anschluss et remplacé par un nazi : « Le nouveau président du club nous a interdit de vous saluer. Mais je vous saluerai toujours Monsieur ».

Ses faits d’armes et ses origines juives déplaisent fortement aux nouveaux maîtres du pays. Mais la grande popularité de Sindelar les empêchent d’agir. Car le maestro, en plus d’être un grand joueur, a été l’une des 1ères stars du football mondial : des habits, des montres et des ballons portent son nom, il fait de la publicité pour des produits laitiers et a même joué son propre rôle dans « Roxy und ihr wunderteam », en 1937.

 

Face au climat de plus en plus délétère, Sindelar se retire peu à peu du football, il rachète un bistrot et joue de moins en moins. Il dispute son dernier match avec l'Austria le 26 décembre 1938, comme un dernier pied de nez il marque 2 buts au Hertha Berlin, club de la capitale du Reich.

 

 

 

Quelques semaines plus tard, le 23 janvier 1939, « Le Mozart du football » est retrouvé mort dans son appartement viennois, au côté de sa compagne de l’époque. Officiellement l’enquête de police conclut à une intoxication au monoxyde de carbone due à un poêle défectueux. Pourtant, beaucoup de personne ne croient pas à cet accident, pour certains Sindelar se serait suicidé pour ne pas avoir à quitter un pays qu’il aimait mais où il était de moins en moins en sécurité du fait de ses origines juives et du symbole, volontaire ou non, de la résistance au nazisme qu’il représentait dorénavant. La majorité de ces sceptiques vont même plus loin en évoquant la thèse d’un double assassinat perpétré par la Gestapo, afin d’éliminer cette idole récalcitrante à l’unification austro-allemande. Quoi qu’il en soit le mystère ne sera sans doute jamais éclairci puisque le rapport d’enquête de la police a disparu durant la 2nde guerre mondiale.

Toujours est-il que 15 000 personnes assisteront à ses funérailles quelques jours plus tard, bravant l’interdiction officielle de toute manifestation. Dernier hommage à celui qui sera élu, des années plus tard, plus grand sportif autrichien du XXème siècle (devant tous les skieurs ayant fait la gloire du pays alpin), mais aussi 22e meilleur footballeur du siècle par l'IFFHS, devant des stars du calibre de Weah, Baresi, Kopa ou Keegan.

Ce jour-là l’Autriche enterrait non seulement le meilleur footballeur de son Histoire, mais elle perdait également le symbole de cette « Wunderteam » qui l’avait tant fait rêver. Un symbole qui avait vu son destin sportif brisé par le fascisme italien et son destin personnel, peut être, brisé par le nazisme du Reich. Sindelar, le footballeur aux pieds d’or s’ajoutait à la longue liste des victimes de cette période trouble de l’Europe, qui, quelques semaines plus tard, allait déboucher sur le conflit le plus meurtrier de notre Histoire. Mozart rentrait pour la 2nde fois au panthéon.



18/07/2013
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 49 autres membres