Mondoculture, le blog des découvertes

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II-A la conquête du monde-Gengis Khan

La première décision du nouvel empereur mongol est de nommer un chaman (sorcier ou grand prêtre très influent) à sa solde, afin de consolider son emprise sur son peuple de turbulents guerriers et préparer d’ambitieuses conquêtes. Quelques mois plus tard, ce chaman, Kökötchü, est mis à mort pour avoir pris trop d’importance dans la conduite des affaires politiques ; le nouveau Khan ne peut accepter qu'on fasse de l'ombre à son autorité.

Après avoir unifié les tribus mongoles, le nouveau Gengis Khan va très rapidement mener ses troupes à l’expansion. Alors pourquoi le peuple mongol, habitué à guerroyer dans ses steppes, a-t-il subitement changé d’attitude et est parti à la conquête de nouvelles terres ? Plusieurs hypothèses peuvent expliquer ce phénomène.

Certains spécialistes affirment que ces conquêtes ont été rendues possibles par l’existence de conditions météorologiques favorables. En effet, au début du XIIIe siècle, les steppes mongoles auraient, semble-t-il, bénéficié d’une pluviométrie accrue, propice à un accroissement de la végétation, permettant ainsi une hausse du cheptel, notamment des chevaux. Cette prolifération a grandement favorisé les conquêtes mongoles, puisque chaque cavalier avait ainsi trois ou quatre montures à disposition, dont au moins une ou deux suffisamment reposée pour couvrir les immenses étendues du continent asiatique.

D’autres historiens évoquent une explication plus sociologique à l’expansionnisme mongol ; ainsi, pour eux, ces attaques seraient une sorte de « lutte des classes » avant l’heure. Sauf que le combat n’aurait pas lieu entre le patronat et le prolétariat, mais entre les nomades, les mongols et les sédentaires, c’est à dire entre la quasi totalité des peuples ennemis. Ces conflits pourraient s’assimiler à une volonté, plus ou moins consciente, d’imposer son mode de vie à l’autre. Pour appuyer cette hypothèse, ces historiens affirment qu’une fois unifiés, les nomades mongols auraient vaincus des peuples sédentaires dont ils auraient alors dispersé les familles, en les déportant et en les séparant, brisant par là même, plus ou moins volontairement, les structures de ces sociétés.

 Enfin, et c’est la thèse la plus fiable, on peut également imaginer qu’après avoir unifié la Mongolie, Gengis Khan dispose d’une importante armée affutée qu’il ne peut laisser inactive sous peine de voir les traditionnelles divisions tribales reprendre le dessus et faire exploser une unité qu’il a mis tant de temps à créer. Il est donc contraint d’expédier le chaos hors de son territoire.


Quoi qu’il en soit, dès 1207, l’année qui suit son accession au rang impérial, les mongols vont commencer à soumettre les peuples voisins. Le Tibet est réduit au rang de vassal du grand Khanat, tandis que la Sibérie du Sud (peuplée par les Kirghizes, les Oïruts et les Tümets) est également conquise cette année-là. Entre 1206 et 1209, trois peuples d'origine turque sont tour à tour dominés : les Onguts (installés au nord de la grande muraille), les Ouïghours (vivant dans l’actuel Xinjiang, ils donneront leur alphabet aux mongols) et les Qarluq (situés en Semiretchie, au sud du lac Balkhach).

À cette période, l'empire mongol devient également suzerain du royaume Tangut (au nord de la Chine) et mène une longue guerre contre les Si-Hia (basés en Chine occidentale), qu’il parvient à asservir provisoirement.

En 1209, après cette première série de conquêtes, Gengis Khan et ses troupes contrôlent une partie importante de la route de la soie. En 1211, Gengis Khan va lancer une vaste campagne contre le puissant empire Jin, solidement implanté au nord de la Chine. Cette campagne est rude et l’armée mongole mettra deux ans pour franchir la grande muraille de Chine et remporter la cruciale bataille de Ye Hu Ling, s'ouvrant ainsi un passage derrière cette fameuse muraille. Durant ces deux années de siège, le royaume Kara-Khitan s'allie au grand khanat, tandis qu'une partie de l'armée, menée par Djebe, en profite pour conquérir la Mandchourie. Malgré le franchissement de la muraille, les mongols rencontrent de grandes difficultés pour s’emparer des cités chinoises. En effet, les troupes impériales étaient alors habituées à combattre dans les plaines sans obstacle de la Mongolie et se retrouvent donc fortement démunies face aux murailles encerclant les cités chinoises. Ce manque criant de techniques de siège efficaces va pousser Gengis Khan à tenter d'améliorer cet aspect de sa tactique.

En 1214 , Gengis Khan et la Chine des Jin finissent par établir un traité de paix. En échange du retrait de ses troupes, le conquérant mongol reçoit de l'or, de l'argent, de la soie, 500 garçons, 500 jeunes filles, 300 chevaux et une princesse de sang.

Néanmoins, cette trêve va être de courte durée. L'année suivante, les troupes Gengis Khanides entament une deuxième campagne de Chine, mais cette fois, elles sont bien mieux armées pour effectuer le siège des cités chinoises. Ainsi en cette année 1215, la capitale des Jin, l'actuelle Pékin (appellée Yanjing à l'époque), est prise, tandis que l'empereur Jin s'est retiré au sud du fleuve jaune. Gengis Khan refuse d’entrer personnellement dans la cité conquise, laissant cet honneur à Muqali, son fidèle général. La légende veut que les mongols aient pillé l'ancienne place forte Jin et que Pékin ait brûlé pendant 70 jours. Au-delà du fait que la chute de la cité impériale affaiblit grandement l'empire Jin, il met également en lumière la nouvelle dimension acquise par les troupes mongoles, capables en quelques semaines de faire vaciller le puissant empire Jin et de conquérir la place forte pékinoise. La réputation de Gengis Khan se développe alors très rapidement en Extrême-Orient, et tous les peuples voisins craignent pour leur territoire.

 

Après cette victoire, le conquérant trouve un conseiller en la personne de Ye Liu Tchou-Tsai, un aristocrate khitan auparavant au service des Jin, qui convainc le grand Khan de ne pas transformer la Chine en prairie. Gengis Khan rentre donc en Mongolie, laissant Muqali gérer les régions chinoises conquises.

Ce retour est rapidement suivi par de nouvelles conquêtes. En 1217, le Turkestan oriental est rattaché à l'empire ; en 1218, l'empire Kara-Khitaï, qui s'était rebellé, est de nouveau vaincu par Gengis Khan ; la même année, il envahit l'actuelle Corée. A la fin de l’année 1218, Gengis Khan contrôle donc toute la Haute Asie et la Chine du nord.

Mais l'expansion mongole va prendre une nouvelle dimension l'année suivante. En effet, en 1219, Gengis Khan déclare la guerre au royaume du Kharezm (actuels Iran, Transoxiane et Afghanistan), dirigé par Muhammad Chah, car ce dernier aurait exécuté des émissaires du Khan. Gengis envoie une force de 100 000 à 200 000 cavaliers pour attaquer ce puissant empire musulman, qui s’étend de la Mer Noire aux contreforts de l'Himalaya, et au Golfe Persique au Sud.

 

 

L'empire du Kharezm au moment où Gengis lui déclare la guerre

 

En 1220, Boukhara et Sammarcande sont prises. À cette occasion, Gengis Khan montre une nouvelle fois tout le dédain qu'il porte aux traîtres, en faisant exécuter les combattants ennemis voulant se rallier à lui, qu’il considère comme des déserteurs. Cependant, Muhamad Chah parvient à s'enfuir ; Gengis Khan envoie alors une partie de ses troupes à sa poursuite. Menées par Djebe, les troupes iront jusqu'en Russie, le chef du Kharezm s’étant réfugié sur une île de la mer Caspienne, où il finira sa vie.

Profitant de leur avancée, les mongols poussent à l'ouest. Ils traversent les actuels Azerbaïdjan et Géorgie, attaquent le peuple Alain et rentrent en Ukraine : c’est leur première incursion en Europe, mais pas la dernière !

Le 31 mai 1222, lors de la bataille de la Kalka, ils battent les Russes venus aider les Ukrainiens. Le prince de Kiev est capturé, puis enroulé dans un tapis et étouffé. Toutefois, ces raids ne sont pas effectués dans un but de conquête, mais plutôt avec l'objectif d'explorer ces contrées lointaines (Kiev est situé à 5000 km de la Mongolie), afin de préparer les futures campagnes. Si bien qu'après ces victoires, Djebe et ses troupes rebroussent chemin pour rejoindre l'armée mongole dirigée par le chef océanique.

 

 

Entre temps, ce dernier a terminé la conquête et le démantèlement du royaume du Kharezm. En 1221, après 7 mois de siège, Ourguentch (actuelle Kohne Urgench), la capitale du Kharezm est prise et détruite, et Gengis Khan poursuit son avancée dans les mois suivants, en prenant tour à tour Balkh (ancienne Bactres), Nichapur, Herat et Merv. Bactres et Merv, bâties par Alexandre le Grand, ne retrouveront plus jamais leur éclat d'antan. En 1222, Gengis Khan franchit l'Indus pour s'attaquer au fils de Muhammad Chah. Il prend les cités de Bamiyan et Ghazni. L'Iran oriental et l'Afghanistan ne se relèveront jamais totalement des destructions mongoles. En 1224, ayant achevé la conquête du Kharezm, les troupes impériales rentrent en Mongolie, non sans avoir établi une administration dans les pays conquis, dirigée par des Darugatchi (sortes de préfets avant l'heure). Deux lettrés musulmans transoxioanais aident Gengis Khan à mettre cela en place.

 

En 1225, le gros de l'armée mongole est de retour dans son pays d'origine, une nouvelle fois pour très peu de temps. En 1226, Gengis Khan montre une fois de plus toute la haine qu'il porte à la traîtrise, en menant une campagne punitive contre les Tangut. Ce peuple avait en effet failli à sa promesse de l'aider à conquérir le Khwarezm et avait herbergé des ennemis des mongols. Franchissant de nouveau le fleuve jaune, Gengis Khan écrase les Tangut en prenant Heisui, Gonzhou et Suzhou. Quelques mois plus tard, en février 1227, la capitale, Lintiao-Fu, est prise. Cette défaite voit l'anéantissement total des Tangut, après 180 ans d'existence.

 

 

 Carte résumant les conquêtes de Gengis khan (NB: le royaume des Tangut

est repris sous la dénomination Royaume des Xixia)

 

 

Le soir même Gengis Khan aurait aperçu un alignement de cinq étoiles. Peu de temps après, le chef mongol décrète que les mongols ne doivent plus tuer aveuglément, conformément à la parole qu'il aurait entendue lors de l'alignement des cinq étoiles. Se sentant faiblir (quelques mois auparavant, il avait chuté de cheval lors d’une partie de chasse, et avait ensuite eu une forte fièvre qui avait manqué de l'emporter), Gengis Khan décide d'organiser sa succession. Il nomme son fils Ogoödeï comme successeur attitré, et expose à un autre de ses fils, Tolui, les plans qu'il avait pour détruire l'empire Jin.

En effet, les Jin, après avoir subis d'importants revers dans les années 1210, ont profité de l'éloignement de Gengis Khan au début des années 1220, pour s'allier avec les Si-Hia contre les mongols. Le grand Khan prépare donc, en 1227, une armée de 180 000 hommes pour écraser cette coalition. Mais il ne pourra pas mener cette expédition à son terme, car le 18 Août 1227, il s'éteint près de Tianshui, à 300 km au sud de Yinchuan, la nuit suivant une nouvelle bataille victorieuse contre les Si-Hia.

Sa mort prête encore à débat : est-il mort de façon naturelle, ou empoisonné par une de ses maîtresses, une princesse Si-Hia, comme le veut la rumeur ?

Quoi qu'il en soit, Gengis Khan restera un mystère jusqu'au bout, puisque même son tombeau n'a jamais été retrouvé. La légende veut que peu de temps après sa mort, son corps ait été ramené en Mongolie, et que sur le chemin du retour, son escorte ait tué tous les témoins du cortège funéraire afin que son lieu d'inhumation reste secret. Si on pense aujourd'hui que le conquérant mongol est enterré dans le massif du Kentei, non loin de la cité de Karakorum (fondée vers 1220 par Gengis Khan en tant que de camp de base), sa tombe reste toujours introuvable à l'heure actuelle.

 

 

 

 

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10/09/2012
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