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9- Fortitude: L'opération qui changea le cours de la guerre

« Si vous pensez qu’ils arriveront par beau temps, en empruntant l’itinéraire le plus court et qu'ils vous préviendront à l’avance, vous vous trompez… Les Alliés débarqueront par un temps épouvantable en choisissant l’itinéraire le plus long. Le débarquement aura lieu ici, en Normandie.» Par ces mots, prononcés début 1944, le Maréchal allemand Erwin Rommel a démontré ses talents de devin et de génie militaire. Le « Renard du désert » était convaincu - à juste titre- que le débarquement des alliés, inéluctable à ce stade de la guerre, aurait lieu en Normandie, et entreprit le renforcement du Mur de l'Atlantique en Normandie.

 

Dès lors, il devint vital pour les alliés de semer le doute dans l'esprit des Allemands quant au lieu et à la date du débarquement. C'est là que commence la plus grande opération de désinformation et de diversion de l'Histoire : l'opération Fortitude!

 

Fortitude ("courage"en anglais) a été imaginée par les services britanniques. L'opération cherchait à faire croire aux Allemands que le débarquement aurait lieu dans le Pas-de-Calais, région la plus proche de l'Angleterre, afin qu'ils y fassent stationner le gros de leurs troupes. Ce stratagème avait pour but de dégarnir le front normand, permettant ainsi aux alliés, après le véritable débarquement en Normandie, de consolider leur tête de pont avant l'arrivée des troupes allemandes stationnées dans le Nord de la France.

 

Bevan et London Controlling Section.jpgpatton.jpg
Le colonel John Henry Bevan (au centre) de la London Controlling Section, à droite le général américain George Patton

 

Pour ce faire, le colonel britannique John Henry Bevan, planifie et dirige les opérations depuis la London Controlling Section à Londres. Ces opérations ressemblent plus à la mise en place d'un décor de cinéma qu'à des manœuvres militaires. La mise en scène est de grande ampleur, on fait importer des centaines de faux chars d'assaut, de pièces d'artilleries, et de camions gonflables fabriqués par les sociétés Goodyear et Goodrich aux États-Unis. Une fois déployés dans les prairies du sud-est de l'Angleterre, face au Pas de Calais, ceux-ci font croire à la présence d'une véritable armée sur place.

Bevan ne laisse rien au hasard : de vrais tanks passent la nuit dans les champs afin de laisser des traces des chenilles. De nombreuses tentes sont montées pour simuler la présence de troupes au sol, et la « Dad's Army », les vétérans de la Home Guard britannique sont mobilisés afin de participer à de véritables manœuvres militaires. Cerise sur le gâteau, Bevan donne un nom à cette armée fantôme : la FUSAG (First US Army Group), et place à sa tête  un vrai général, et pas des moindres : le prestigieux général George S. Patton.

Pour mieux fausser les pistes, la DCA britannique laisse les avions de reconnaissance allemands survoler les zones où opère cette armée fantôme.

 

fortitude.jpgUn faux char gonflable porté à la main par quatre soldats

 

Mais il ne suffit pas de mettre sur pieds une fausse armée dans le sud-est de l'Angleterre pour berner l’État-major allemand, il faut aussi lui transmettre des informations tendant à une invasion via le nord de la France. Et c'est là que démarre le second volet de l'opération Fortitude, l'intervention des espions. Car Fortitude est aussi une formidable histoire d'espionnage. Quasiment tous les espions allemands présents en Grande-Bretagne ont été démasqués par les services secrets britanniques, certains sont devenus des agents doubles, trahissant l'Allemagne nazie. C'est le cas de l'Espagnol Juan Pujol Garcia, alias Garbo. Ce dernier est un as dans l'art de la désinformation, et corrobore l'hypothèse du débarquement dans le Pas de Calais, en transmettant de faux renseignements à l'Abwher, le service de renseignement nazi.

Son passé de franquiste plaidant en sa faveur, les Allemands ont une confiance aveugle en Garbo et son réseau de 24 espions (agents doubles eux aussi) dans la zone de la FUSAG.

 

Le véritable chef d’œuvre de l'opération a lieu le 6 juin 1944, jour du véritable débarquement. Quelques heures avant celui-ci, Garbo annonce aux Allemands qu'une opération de grande envergure aura finalement lieu en Normandie. Le temps que les Allemands reçoivent le message et le déchiffrent...les Alliés sont déjà sur les plages normandes. Bien qu'inutile pour eux, le message renforce la confiance des Allemands envers Garbo, qui n'est pas démasqué et représentera un atout non négligeable pour la suite du conflit !

 

Joan_pujol_garcia.jpg
Joan Pujol Garcia, alias Garbo

 

Après le débarquement, les nazis prennent ainsi très au sérieux ce message du même Garbo : « Un deuxième débarquement est en cours. Il aura lieu dans le Pas-de-Calais. Ne vous laissez pas abuser par l'opération Overlord ».

Hitler laisse donc la puissante XVème armée allemande dans le Pas-de-Calais, alors que celle-ci aurait anéanti sans mal la faible tête de pont alliée établie dans les heures suivant le débarquement.

Au bout de quelques semaines, le Führer comprend enfin la supercherie et ordonne finalement à cette XVème armée de se déployer en Normandie. Mais cet ordre n'intervient qu'en Août, il est déjà trop tard pour l'Allemagne nazie, tombée dans le piège de l'opération Fortitude, qui contribua fortement à lui faire perdre la guerre.

 

Article précédent: Le soldat japonais qui continua le combat jusqu’en 1974

 

 

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01/03/2015
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